Mascara par André CORTES

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L’autre jour, en revenant de la commémoration du 26 MARS, je discute avec un vieux monsieur qui se trouve être le père d’un ami de Mostaganem qui fait des vers tellement compliqués, qu’il est obligé de te mettre  le mode d’emploi à la fin ! non je plaisante! que si c’est bien de lui ? le chapeau tu peux ben lui tirer !

D’où t’y es toi ? qu’il me demande le huelo

De Mascara ... C’est un mot magique ma parole ! tu vois tout de suite l ‘oeil qui s’égaye, les narines qui frémissent et je crois bien que c’est la seule réaction spontanée qui est commune aux Pieds Noirs et aux Patos.

Toute de suite, c’est pas à la ville que les gens pensent, mais à ce nectar engendré sur les pentes des Béni-Chougrane et qui a rempli d’aise des millions de gosiers connaisseurs.

Donc, après la mimique révélatrice, la deuxième chose qui vient à l’esprit d’un Oranais, et à plus forte raison d’un Mostaganémois, un voisin, c’est l’équipe de foot de l’avant garde de Mascara - l’A.G.S.M

Purée ! l’A.G.S.M.  - que des matchs terribles qu’on s’est pas fait !..

Je laisse vagabonder son esprit - lui revoit les jours des années 30-39 : ROBERGEOT - SOLER - MARTINEZ..  moi ceux de 50-60 : JORRO - LAUER - RUEDA - EL GHOTNI - Le goal JORRO, une réplique de YACHINE, et nous ,les gosses, on n’était , pas peu fiers tu penses! C’était notre moniteur d’éducation physique à l’école primaire  ALEXANDRE III et EL GHOTNI ! un mélange de GIRESSE pour les dribbles, de PLATINI pour la pour la vista et BATTISTON pour les tirs de loin , à part que lui, c’était pas un tous les deux ans qu’il mettait au fond, mais deux par semaines, que même un fois l’information elle a circulé que le sélectionneur de l’équipe de France, il hésitait entre KOPA et lui pour le N°10.

Bon, j’arrête la tchache pour t’expliquer MASCARA

Par n’importe quelle route prise pour arriver dans la cité de l’ÉMIR Abdel-kader , ma première battisse qui s’offre aux visiteurs, est une cave vinicole. Venant d’Oran, sur le versant sud, la cave LESCAR où s’amorce une descente majestueuse bordée de mûriers où l’on s’approvisionnait pour l’élevage des vers à soie.  Si l’on prenait le temps de s’arrenter un instant au bord de la murette, on découvrait aussi loin que l’œil pouvait voir, au premier plan, en contrebas, les fameux cèpes, vert tendre et éclaircis au printemps, bruns et tendus vers le bas  - à la fin de l’été, faisant tache sur cette terre blanchâtre et caillouteuse. Au bas des cyprès, des peupliers et un  bois de pins C’est ST ANDRE de  MASCARA, le lieu d’évasion des citadins, des premiers baisers, et malheureusement pour certains une fin de vie un peu triste avec l’Hospice voisin.  A droite, à gauche, au loin, la plaine d’EGHRISS : blé, maïs vers TIZI et MAOUSSA, agrumes et arbres fruitiers vers PALIKAO.

Reprenons la route, des pavillons coquets la bordent, à gauche en remontant la colline, le faubourg Suisse qui un jour d’Octobre 1938 a vu naître un charmant bambin - Plus bas en face du stade, à droite le quartier de la gare - la rue descend toujours, à droite avant la grande poste, une place , lieu  consacré par les passages des cirques ZERBINI et ANTONIO Une grande grille en fer forgé et un escalier monumental donne accès au jardin PASTEUR, comparable par sa configuration, aux Buttes Chaumont - à la différence essentielle que le site est  naturel. Sous les ombrages de l’allée principale , des ânes sellés promenaient lentement les petits.

La rue pavée remonte lentement vers le centre ville, à gauche BAB-ALI, mimi Casbah grouillante, colorée les jours de grands marchés, les odeurs, bien sûr, les mouches , l’étal de pastèques énormes me restent en mémoire.

A droite, la rue d’ORAN, commerçante avec ses merceries et épiceries mozabites - ensuite la place GAMBETTA, cœur de la ville ceinturée de palmiers géants - kiosque a au centre , où l’harmonie municipale sévissait avant l’ heure de l’apéro - Les terrasses des cafés couvraient la partie basse : tous les deux ans, ils organisaient en mini fesse rival du jazz - DIZZY GILLESPIE en personne, Claude LUTTER REWELIOTTY, Eau CAD ILL - ouais mon vieux, kif à ANTI-GBES.

Au nord de la place, un jardin public avec fontaines, poissons rouges et massifs de fleurs faisant l’admiration de la population et la fierté de mon père qui en était le maître d’œuvre en tant que chef jardinier de la commune. La mairie et les bâtiments administratifs bordaient ce jardin.

MASCARA c’est aussi la Légion, omniprésente dans la ville - les défilés patriotiques avaient de la gueule comme on dit...

Après la caserne, la rue de Mostaganem - au bout le cimetière - à gauche en surplomb, les villas des notables, treilles de roses et de bougainvillées.

Quelques souvenirs qui restent toujours présents, le lycée de garçons, énorme bâtisse - Profs aux accents étranges!

La “ carrière “ où les pieds nus et les espadrilles disputaient des matchs de “cacharo” épiques - Les arbres : caroubiers dont la fève douceâtre se suçait pâteuse ment, mais setransformait en boomerang à l’occasion - faux poivriers vers TIARET - platanes vers SAIDA - l’Eglise, belle, claire avec ses
deux clochers tronqués - Les remparts où tout le monde trouvait chaussure à son pied - les “soukardjis” de l’ombre pour cuver - les amoureux des recoins pour s’aimer - les anciens, des bancs pour se reposer et nous les jeunes, des chemins de ronde à explorer - des pantalons à déchirer- des genoux à couronner.

A propos des remparts, le seul souvenir de la guerre 39-40 qui me reste en mémoire, à par l’absence de mon père, prisonnier en Allemagne, c’est l’excitation mêlée d’incertitude des habitants des quartiers périphériques qui bivouaquaient à l’intérieur des hauts murs, porte monumentale fermée, en Novembre 1942 lors de l’arrivée des Américains - J’ai eu l’ explication bien plus tard en apprenant la période de flottement qui a suivi de débarquement en A.F.N.

André CORTES                            Remonter