LA SECHERESSE ET LES SAUTERELLES

• ACCUEIL • Sommaire • Ecrire des souvenirs • L'armoire • L'armoire de G. Leverone •

 

 

Les inondations de la vallée de la Somme qui tournent au cauchemar pour ses habitants me rappelle une situation vécue dans mon enfance à Mascara, d’un tout autre aspect, avec les années de sécheresse et l;es invasions de sauterelles.

Dans ces périodes-là, il se déroulait dans les rues de la ville par une température très chaude, un rituel très coloré. Les petits fellahs, par manque d’eau, et afin d’implorer le ciel de déverser sa manne bienfaisante, promenaient dans les rues de la cité d’Abd-el-Kader un taureau noir, tout enrubanné de couleurs chatoyantes. Les tenues de ceux qui se tenaient près de la bête ne l’étaient pas moins. Leurs habits de lumière me rappellent ceux des toréros d’aujourd’hui.

Suivaient les musiciens avec leurs raïta, les chebkas et les tam-tam.

Cela faisait un bel ensemble harmonieux, malgré le tintamarre. Et la chorale, qui faisait partie du spectacle, entonnait alors les louanges à Dieu, sous forme d’une mélopée : « Ya Sidi Moulana, artina l’ma ! »

En passant sous les fenêtres ou balcons des maisons, les habitants leur jetaient des pièces en signe de solidarité avec eux.

Cette eau tant désirée était aussi pour tous synonyme de bien-être, les marchés mieux approvisionnés en fruits et légumes, et les coupures d’eau moins fréquentes.

 par Monsieur Paul Naoun

60000 – Beauvais 2001

 Fellahs :  petits paysans

Raïta : espèce de flûte

Chebka : sorte de très grandes castagnettes, mais en fer

Ya Sidi Moulana, artina l’ma ! : seigneur, donne-nous l’eau !