Des milliers de souvenirs

ACCUEIL Sommaire Ecrire des souvenirs L'armoire L'armoire de G. Leverone

  Par  Gérard Cortès

   Je suis né le 20 novembre 1942 au faubourg Suisse, dans la maison où vivait la famille GUIRAO à Mascara. J’ai encore en souvenir l’atelier de mécanique et la cour où stationnaient les véhicules noirs Citroen et Renault, le portail au fond qui donnait sur le plateau et par lequel on descendait sur le faubourg de l’Argoub ou Bab-Ali. La famille GUIRAO comptait plusieurs garçons et le plus jeune se nommait Jacques. Ses proches et ses voisins l’appelaient Jacky. Dans le même quartier, vivaient aussi les familles AGERON, NOBLET, BARBERA, GOMEZ, YAGO, mes grands parents paternels, et bien d’autres encore. Nous sommes restés dans ce quartier jusqu’en 1946/47. Ensuite, nous habitions 5 rue de Médéah, non loin de la Clinique DARIEX, du Tribunal, et surtout du Collège de Garçons. Dans cette même rue, vivaient des footballeurs de l’A.G.S.M. et du GALLIA, au N° 1, MARTINEZ, dit Pitolet, au N° 5, EL GOTNI, « Le Gaucher » Monsieur AOUED, l’entraîneur, Gilbert DIAZ, marié avec une fille HERNANDEZ, et au N° 6, Roland CHARBIT « Le Goal » Nous sommes restés dans ce quartier jusqu’en 1958, et de 58 à 62, nous habitions aux villas du faubourg Faidherbe.
   Je voudrais tout d’abord demander à Guy DRAI, qui était le copain de mon frère Serge CORTES, s’il a des nouvelles de Georges DAHAN que j’estimais beaucoup, et s’il se souvient des parties de rigolades et fous-rires, les « chaussures de pompiers » que nous avions lors de nos tournois de foot, à la grande carrière, tout près de chez lui. Et à Jean-Claude PREGUERCUELO, s’il se souvient du « trafic d’armes » que nous entretenions tous les deux ? Je lui échangeais des couteaux fabriqués à partir de bouts de bois blanc, contre des livres de Blek le Roc, Bug James, Garry, ou les Pieds Nickelés, que je troquais de nouveau contre des paquets de cornets d’amandes grillées et salées ou pois chiches « toraïcos » à un vendeur qui venait rue de Médéah.
   Qui ne se souvient pas du 14 juillet à Mascara, dans les années 50 ? Dès 9 heures du matin, nous prenions position place Gambetta, face à la librairie GARSON. Là, nous voyions défiler différentes armes, « Terre, Air, Mer » et pour clôturer, les Sapeurs de la Légion Etrangère. Tenues impeccables, surtout les chemises, avec les plis dans le dos, l’alignement des hommes, et surtout la cadence de marche, aussi régulière qu’un mécanisme de montre. Le défilé terminé, la foule se disperse, et on remarque les hommes qui se dirigent vers les bars qui cernent la place Gambetta : chez Lili TOBELEM, Brasserie le Club, COSTES, au Marignan, TORRES, en haut des escaliers, à côté de la Mairie, bref tous ces bars qui servent de la kémia, beignets, tramousses, fèves, olives, escargots, moules, etc…
   L’après-midi, après la sieste, nous prenions d’assaut les deux kiosques à bonbons ALI et BEROS. Nous achetions des bonbons, des pierres à feu, et les fameux caramels rectangulaires dotés de photos de footballeurs ou bien d’acteurs de cinéma que nous collions dans des albums, et nous échangions les doubles entre nous.
   Notre point de ralliement se situait entre les deux kiosques éclairés par des lampes à acétylène qu’il fallait ravitailler en eau et pierres de carbure de calcium, sinon elles s’éteignaient. Vers minuit moins le quart, l’orchestre cessait de jouer, et les gens se dirigeaient vers le bas de la place Gambetta, face au jardin de la Mairie, pour être aux premières loges, car c’est de là que le feu d’artifice était tiré. Je me rappelle encore du final : le feu d’artifice se terminait presque toujours de la même façon par de très grandes gerbes d’étincelles, genre fontaines de Versailles. Dix minutes plus tard, chaque famille rentrait chez elle à pieds, car à cette époque, il n’y avait pas beaucoup de voitures à Mascara. Quant à ALI et BEROS, ils attendaient qu’il n’y ait plus personne pour fermer leurs kiosques.